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Entreprendre dans la vingtaine, une mauvaise idée ?

Weblove est une agence web qui aide les entreprises à réaliser leurs coups de foudre numérique. Dans nos articles, on partage notre vision, notre opinion et notre vécu avec vous.

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Maxime Nadeau

2019-12-04

« Tu vas voir mon homme, quand tu vas te lancer en business, les petits problèmes de la vie vont t’affecter pas mal moins qu’avant ». C’est ce que mon père m’a dit un hiver, en chemin vers Québec, impassible du fait qu’il était stuck sur la 20 avec son camion en pleine tempête. Je lui avais demandé « Ben voyons, ça te stress pas plus que ça d’être pogné sur la 20 ? ».

Mon père est entrepreneur depuis plus de 35 ans. Je peux maintenant te confirmer la sagesse de ses propos, parce qu’asteure, les petits problèmes de la vie m’affectent pas mal moins qu’avant. Pour te mettre en contexte, je quitte bientôt la vingtaine, période où j’ai commencé (très jeune) mon chemin d’entrepreneur.

Je ne peux pas m’empêcher de trouver que le mot entrepreneur est galvaudé ces jours-ci, surtout pour ma génération (je m’excuse en son nom). Et non, le fait de sharer des photos de toi qui colles des post-its sur un mur, ou de partager des quotes de Steeve Jobs sur Facebook, ça ne fait pas de toi un entrepreneur …

Y’a rien de glamour ou de cool dans le fait d’être un entrepreneur. Si c’est la vie que tu veux mener, arrête de faire semblant, prends tes responsabilités, crée des jobs, de la richesse et quelque chose d’utile pour ceux qui t’entoure ou ta communauté. Si tu crées quelque chose qui n’existe plus quand tu quittes la pièce, t’es pas un entrepreneur ; t’es un travailleur autonome. Si ce que je viens de te dire te choque un peu, met le chapeau, il te fait bien.

Malgré le fait qu’il y a au moins un article par mois qui sort sur le fait que les propriétaires d’entreprises ont une santé mentale chambranlante, je n’aime pas trop participer à l’image qu’il faut être un peu « fou » pour se lancer... C’est surement vrai, mais à mon humble avis de « pas expert là-dedans », je pense surtout que c’est une question de culture. L’image du gars/fille qui en prend lourd sur ses épaules, et qui continu sa journée le sourire aux lèvres, impassible, c’est un mirage. On vit tous un stress constant, mais avec le temps, on a fait pas mal de squats « de problèmes », et on peut ajouter du poids sur la barre pas mal, mais on la sent quand même.

Je pense qu’il y a moyen d’être heureux et entrepreneur en même temps, même dans la vingtaine, même quand tu pars de pas grand-chose, même quand t’es pas le plus brillant de la classe. Ça dépend uniquement de la raison qui te pousse à te lancer en affaires. Si tu approches l’entrepreneuriat avec les mauvaises valeurs, ou bien les mauvaises raisons, c’est clair que tu vas être malheureux.

Si ton objectif c’est de montrer à la planète à quel point tu as du succès, que tu fais de l’argent, et que tu as compris la « game », c’est probablement que t’as un gros manque de confiance en toi.

Les petits jeunes qui riaient de toi au secondaire s’en sacrent pas mal de ton image de succès. Si tu te lances en affaire, ne le fais surtout pas pour les autres. Travaille sur toi, apprends à communiquer, à partager, à être transparent, à t’entourer de gens plus brillants que toi. Si l’image d’être un boss omnipotent c’est ton but, prépare-toi, parce que des erreurs tu vas en faire, tu vas devoir les admettre, et ramasser les pots cassés toi-même. T’auras pas toujours raison, et par la force des choses, tu vas avoir une période difficile où tu vas chercher les sous à cause que la fin du mois balance pas. À un moment ou à un autre, tu auras à avouer que tu perds de l’argent plutôt que d’en faire, et le pire, c’est que des fois tu vas devoir prendre le blâme pour des affaires qui sont même pas de ton ressort. Ishh !!

Tu dois me trouver intense dans mes propos, mais dis-toi que j’écris cet article dans un but précis : donner l’information que j’aurais aimé avoir à 22 ans … Avec du recul et un peu plus de sagesse, c’est pas mal plus facile pour moi de partager ce que j’ai vraiment vécu.

Si je devais recommencer, je le ferai sans hésiter, sans rien changer, car c’est le meilleur coup de pied au cul que j’ai reçu de ma vie. Je vais pouvoir l’enseigner à mes enfants, à mes amis, et à mes collègues. Comme un vaccin, c’est gossant à recevoir, mais c’est efficace en maudit.

La deuxième année a été la plus dure. Juste avant Noël, on était au pied du mur, parce qu’il nous restait juste assez de capital pour payer une prochaine paie aux employés, sans pouvoir me payer moi-même et mes associés. (En passant c’est quelque chose que tu vas apprendre : le dernier à être payé, c’est toi mon chanceux). Je sais pas si tu as déjà vécu le problème, mais dans le temps de Noël, c’est pas mal dur de vendre quelque chose de nouveau ou de closer un deal, parce que le monde sont — pas mal — en vacances. Finalement, ce qui nous a sauvés, c’est un petit prêt de 20 000 $ sous forme de marge de crédit ; juste assez pour nous financer un mois de plus.

Avec le recul, ça me fait rire. On n’avait jamais essayé de prendre un prêt avant ce moment-là, en se disant à nous-mêmes qu’on ne pourrait jamais se faire approuver. On était tellement content, on roulait par terre dans notre salle de conférence. 20 000 $ pour nous c’était un gros morceau, et on ne dormait plus la nuit à cause de ça ! Maintenant, ça représente à peu près notre coût d’opération aux deux semaines, et on dort très bien.

Tu en veux plus ?

À la fête de mes 25 ans — la journée même — j’ai reçu une lettre par la poste de l’un de mes clients importants duquel j’attendais un paiement. Il venait de faire faillite, et on était très loin sur la liste des créanciers. Bref, juste « de même », on venait de perdre notre fonds de roulement durement gagné.

Une heure plus tard, je reçois un appel d’un fournisseur qui nous avait nargués sur la facilité d’intégrer sa solution. Je devais monter à Montréal dans les « plus brefs délais » pour présenter notre « projet d’intégration », afin qu’il soit « approuvé » par leur équipe de développeurs. Notre client avait investi pas mal d’argent pour son lancement — qui était due dans une semaine. Puisque c’était impossible de faire le lancement sans cette intégration, j’ai dû travailler nuit et jour pour terminer l’intégration à temps, pendant pratiquement 7 jours. On était les premiers au Québec à créer une solution du genre, et c’était un projet qui me tenait énormément à cœur. Tout ça, je l’ai fait en terminant d’autres projets en même temps, parce qu’on devait remonter notre fonds de roulement.

Une fois l’épreuve terminée, avec le peu de fonds que je me permettais, je me suis dit que je méritais probablement une bonne bouteille de vin. Je me suis rendu à la SAQ pour m’acheter toute qu’une bouteille toué ; un Chianti Classico à 20 $ (je connais rien au vin)... J’arrive dans le stationnement, je mets la bouteille dans ma poche de manteau ... et par accident j’échappe la bouteille dans le fond de mon char, où elle éclate en mille morceaux sur le tapis, sur la console, et sur le banc passager … Heureusement, il y avait un bon samaritain dans le stationnement qui a vu la scène. Il m’a passé un genre de canne push-push avec une brosse pour gérer ça, great.

J’avais la mort d’écrit dans la face, et pour me consoler, il me dit : « Tsé, dit toi qu’il-y-a pire dans la vie. » Ben oui, criss !

Je suis remonté chez moi, je me suis assis sur mon divan, et j’ai regardé le mur pendant une bonne heure et demie, en me posant sérieusement la question : « mais qu’est-ce que je suis en train de foutre avec ma vie ? » J’étais tellement rongé par le stress et la fatigue, que je pesais environ 125 livres pour 5’10’’ (c’est pas beaucoup). Je négligeais sérieusement ma santé physique sans réfléchir, trop obsédé de livrer pour donner de la valeur aux autres.

Tu voulais l’image de l’entrepreneur qui réussit ? Bin la voilà, la vraie, elle est là, figée dans le temps comme une photo. Partage-là sur Facebook celle-là, parce que c’est elle que le monde devrait voir.

Dans ma réflexion, je me suis rendu compte que je ne voudrais pas faire autre chose avec ma vie. L’alternative aurait été de tout laisser tomber, en comprenant que l’entrepreneuriat c’est pour les fous, et de refaire mon CV pour me trouver une « job » quelque part. Pour moi, faire ça aurait été PIRE que de revivre des moments aussi difficiles, parce que j’aurais abandonné le potentiel que je voyais en moi pour « fitter » dans une case, du genre de celles où on accepte à peu près n’importe quel compromis pour échapper aux vraies responsabilités.

Hey, on est rendu loin du début de l’article où je disais que c’est possible d’être heureux et entrepreneur à la fois !

Mais comprends-tu, à cause de ce moment-là, j’ai jamais été aussi heureux de toute ma vie. Heureux parce que y’en avait pas d’alternative pour moi : j’avais trouvé mon spot. Peu importe la quantité d’heures que je mets, peu importe la quantité d’argent que je peux faire, peu importe l’image que je peux projeter, peu importe les activités que je manque, je m’en fous. Je fais ce que j’aime, et je veux le faire le plus longtemps possible. Je peux me regarder dans le miroir le matin, et me dire que je ne suis pas en train de gaspiller le temps qui m’est donné.

Je ne pense pas à ce que je pourrais faire aujourd’hui pour avoir plus d’argent. Je pense uniquement à ce que je peux faire pour pousser ma vision plus loin. Je pense à ce que je peux apprendre et partager avec ma gang, pour les emmener plus loin. Je cherche à mettre des gens en relation, à créer de la richesse, de l’emploi, des idées. L’argent pour moi, ce n’est pas une récompense, c’est un outil.

Est-ce qu’entreprendre dans la vingtaine est une bonne idée ? Probablement pas. Est-ce que c’est plus une bonne idée dans la trentaine ou quarantaine ? Probablement pas non plus.

Dans le fond, peut-être qu’on est tous un peu fous, mais si tu as une petite voix interne comme la mienne, hésite pas une seconde : lance-toi, and ride the beast.

« Tu vas voir mon homme, quand tu vas te lancer en business, les petits problèmes de la vie vont t’affecter pas mal moins qu’avant ».

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Maxime Nadeau

Co-Fondateur de Weblove & Sudo. Je m'intéresse au marketing, aux technologies au design et au leadership.